le Lundi 21 avril 2025
le Samedi 5 février 2022 9:00 | mis à jour le 25 mars 2025 14:06 Autochtone

Un long chemin détaillé dans un livre

Un long chemin détaillé dans un livre
00:00 00:00


David Beauchamp

Photo: Memorial University Press

Lors des premières démarches de réconciliation entamées en 2008, Stephen Harper avait fait abstraction des victimes des pensionnats de la province et avait omis de présenter des excuses à ces dernières. L’ancien premier ministre expliquait que la province de Terre-Neuve-et-Labrador n’a rejoint le Canada qu’en 1949, et que le pays n’était donc pas responsable des pensionnats créés avant cette date. Ce n’est qu’en 2017 avec le passage de Justin Trudeau à Happy Valley-Goose Bay que des excuses officielles du gouvernement fédéral canadien sont présentées. Des excuses qui se seront faites attendre longtemps.

«La vérité pour nous au Labrador a été dite à plusieurs reprises et […] cela nous fait mal, et nous fait souffrir en tant que peuple du Labrador, en tant qu’Inuit, et en tant qu’Innu de ne pas avoir été crus. Notre vérité n’a pas été intégrée dans les excuses […] et notre seul recours sont les tribunaux canadiens».  

Charlotte Wolfrey, leader inuit à Rigolet¹

Dans son ouvrage, Andrea Procter raconte sans détour cette vérité et comment ces institutions font partie d’un bloc colonial global. Même si les pensionnats du Labrador et de Terre-Neuve n’étaient pas dirigés par le gouvernement fédéral à proprement parler, ils partageaient malgré tout les mêmes objectifs: convertir les enfants autochtones au christianisme, et plus tard, «civiliser» les peuples inuits afin de les intégrer à la société blanche et occidentale. 

«Les pensionnats faisaient partie d’un plus grand ensemble de colonisation. Il y avait une intention; les écoles étaient là pour changer les gens, pour les rendre identiques aux autres et les rendre mésadaptés [à leur mode de vie traditionnel]. Aujourd’hui […] il faut apprendre à décoloniser.»

Shirley Flowers, ancienne élève originaire de Rigolet²

Composé en quatre parties, le livre de Procter raconte l’histoire des peuples du Labrador avant la colonisation pour ensuite présenter l’histoire de ces peuples après l’arrivée des missionnaires européens au 18e siècle, soit l’Église morave et l’Association internationale de Grenfell et leur administration des pensionnats. Chacun des pensionnats est présenté de manière individuelle ce qui permet d’apprécier  l’étendue et la complexité du processus de colonisation dans la province ainsi que le rôle qu’ont joué ces institutions religieuses dans ce processus. Des anciens élèves témoignent également de l’impact que leur expérience aux pensionnats ont eu sur eux alors que plusieurs souffrent encore aujourd’hui des séquelles de cette expérience. 


À propos de l’autrice: Andrea Procter est doctorante en anthropologie de l’Université Memorial. Elle est chercheuse indépendante et a travaillé plus de vingt ans en collaboration avec les Inuits. En 2017, elle a rejoint le projet Newfoundland and Labrador Healing and Commemoration avec James Igloliorte afin de documenter l’histoire des pensionnats au Labrador. 

Le livre est disponible pour emprunt dans les bibliothèques publiques de la province: https://nlpl.ca/

Plus d’informations sur le livre se trouve sur le site web Arctic Focus, A Long Journey: Residential Schools in Labrador and Newfoundland | Arctic Focus


1 traduction libre, A Long Journey: Residential Schools in Labrador and Newfoundland, page 3

2 traduction libre, A Long Journey: Residential Schools in Labrador and Newfoundland, pages 4 et 5


Photo: Archives Them Days

Cet article fait partie de notre dossier:

Le colonialisme par l’éducation

À lire aussi: