Charles Garnier
Vous l’aurez compris: Je suis un chasseur. Je suis celui perçu comme un assassin sans âme par les adeptes de l’extrémisme philosophique en éthique et bien-être animal. Je profiterai de la tribune qui m’est offerte ici pour tenter de recadrer quelque peu les principes de la pratique de cette activité malmenée par toutes sortes de croyances populaires et de désinformation. Bien sûr, si vous êtes de ceux qui voudraient rendre illégale la consommation de viande, incluant tout ce qui est offert au comptoir de la boucherie près de chez vous, je n’apporterai aucun argument susceptible de vous faire changer d’idée et je vous prierai d’abandonner la lecture de ce texte dès maintenant. Si vous pensez cependant que le choix d’en consommer peut être fait tout en étant respectueux de la nature qui nous offre cette ressource, voici comment je perçois la pratique de cette activité.
L’évolution de la race humaine nous a positionnés au sommet de la chaîne alimentaire. Nos habiletés physiques et cognitives nous ont permis de nous développer depuis l’ère préhistorique en dominant notre environnement et les autres créatures moins avantagées que nous par la nature. Il y a à peine un siècle de cela, personne n’aurait remis en question la légitimité de l’humanité à utiliser les ressources alimentaires offertes par la nature. L’augmentation exponentielle de la population mondiale et la surconsommation à outrance ont cependant modifié l’équilibre établi. Les scientifiques ont tout à fait raison de nous mettre en garde et de faire pression sur tous les niveaux gouvernementaux pour mettre en place des moyens de réduction de notre consommation abusive des ressources naturelles de toutes sortes. L’humanité court à sa perte si nous n’arrivons pas à renverser la tendance.
À l’échelle du pays, les denrées alimentaires sont transportées par camions sur des milliers de kilomètres depuis les producteurs, passant par les centres de distribution avant de se rendre jusqu’aux consommateurs. Parmi ces denrées, la viande de bœuf offerte au comptoir de boucherie de mon épicerie locale provient d’élevages industriels de partout au pays et a ainsi pu parcourir des milliers de kilomètres pour se rendre jusqu’à moi. Outre les retombées écologiques associées à ce transport, le coût environnemental de ces élevages industriels et l’étendue des terres fertiles utilisées pour l’agriculture servant à l’alimentation du bétail sont également immenses.
J’ai la chance d’habiter un vaste territoire avec une densité de population très faible. L’abondance des richesses naturelles m’entourant me donne un choix que tous n’ont pas. Je choisis donc de profiter de mon rang supérieur dans la chaîne alimentaire pour aller chercher moi-même, à quelques kilomètres de mon domicile, une viande de qualité supérieure avec un impact considérablement réduit sur l’environnement. Ce faisant, j’utilise aussi l’intelligence dont l’évolution m’a doté pour sélectionner judicieusement la bête qui remplira mon congélateur pour mes besoins nutritifs. Je ne choisirai pas une espèce menacée d’extinction, je ne prélèverai pas une femelle accompagnée de ses petits et je ne risquerai pas de blesser inutilement une bête si je ne suis pas certain de la précision de mon tir. Je m’assure également de ne gaspiller absolument aucune partie comestible de ma récolte et je pratique cette activité dans le respect de tous les règlements municipaux, provinciaux et fédéraux.
La chasse à l’ours noir est mon activité préférée, non seulement pour la qualité inégalable de la venaison mais aussi pour le contact étroit avec la bête qui me permet d’établir une relation de respect avec elle.
J’ai la chance en effet d’interagir avec l’ours que j’ai ciblé lorsqu’il devient moins méfiant de ma présence régulière durant la période d’appâtage. En adoptant une routine quotidienne rigoureuse s’échelonnant sur plusieurs semaines, j’habitue tellement l’ours à mon horaire et à ma présence qu’il finit par m’attendre au site d’appâtage à l’heure habituelle. Ces contacts étroits avec lui me permettent de me placer à son niveau, de le respecter et de me méfier de lui tout comme lui se méfie de moi. Il m’observe, m’analyse et me teste. Il tente de me faire fuir en se montrant agressif pour protéger son territoire d’un compétiteur, ne comprenant pas trop bien le lien entre ma présence et l’apparition de la nourriture au site d’appâtage. Je réplique en me montrant plus grand et plus imposant que lui, l’arme dans mes mains me rendant plus confiant. Cet exercice de mesure de l’adversaire et de démonstration de puissance m’enseigne beaucoup plus de respect pour la nature et cette bête que si je l’avais récolté à notre première rencontre.
Après quelques jours consécutifs à me mesurer ainsi à lui, sa méfiance à mon égard est réduite au point qu’il ne se gêne plus pour m’approcher malgré mes tentatives de démonstration de puissance. C’est le moment que je choisis pour le récolter, alors qu’il est dans son élément et dans la situation qui lui est familière, soit celle du prédateur en plein contrôle de son territoire. J’ai la prétention de croire que la fin de vie de cet ours dans ces circonstances est plus naturelle que celle du bœuf transféré vers l’abattoir après une courte vie en captivité, à être engraissé industriellement.
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Je ne cherche pas à convaincre personne par ce texte d’adhérer à la chasse à l’ours pour assurer leur subsistance mais je souhaite susciter une réflexion sur l’opinion souvent négative que plusieurs se font sur ceux qui pratiquent une activité de chasse, quelle qu’elle soit.
Je souhaite une belle saison estivale dans le respect des opinions différentes à tous les lectrices et lecteurs du Gaboteur!
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