Magazine d’été 2022 – Q: Qalipu – La renaissance mi’kmaq se poursuit
Coline Tisserand
Une lutte de longue haleine pour la reconnaissance
Si ces célébrations marquent les dix ans de la création de la Première Nation Qalipu, le chef rappelle que cette lutte pour la reconnaissance officielle des Mi’kmaq en est une de longue haleine qui a débuté dans les années 60 et 70. «La Première Nation Qalipu a été établie officiellement le 22 septembre 2011 comme ‘’une bande sans terre ou sans territoire’’ (a landless band), ce qui signifie que nous ne vivons pas sur une réserve», explique Brendan Mitchell, qui n’est autre que le petit-fils de Mattie Mitchell, guide et prospecteur mi’kmaq renommé qui sera reconnu comme personne d’importance historique nationale en 2002.
Aujourd’hui, presque 24 000 personnes ont été reconnues comme membres de la bande Qalipu, ce qui en fait en 2021, «la deuxième Première Nation en importance au Canada», selon le site Internet du Gouvernement du Canada.
Ce sont cependant plus de 100 000 personnes qui ont soumis une demande d’adhésion à la Nation Qalipu depuis 2011. «Le processus de sélection reste une préoccupation majeure pour moi, pour notre conseil et, oui, pour nos concitoyens», mentionne le chef Qalipu Mitchell.
«Une étape importante dans le processus de réconciliation»
Si les critères d’admission du gouvernement fédéral pour être reconnu comme membre Qalipu sont encore aujourd’hui un sujet de discussion épineux au sein des 67 communautés Mi’kmaq de Terre-Neuve, Brendan Mitchell cherche à rester positif en ce 22 septembre 2021 et se réjouit du chemin parcouru jusqu’ici. «La création de la Bande il y a dix ans constitue un jalon incroyable dans la vie des Mi’kmaq de Terre-Neuve. […] Cette reconnaissance par le gouvernement fédéral est une étape importante dans le processus de réconciliation.»
Brenda Mitchell mentionne que durant ces dix ans, la Première Nation Qalipu a aussi progressivement reçu la reconnaissance des autres nations Mi’kmaq et des autres peuples autochtones, notamment depuis leur participation aux congrès organisés par les chefs des Premières Nations des provinces de l’Atlantique, The Atlantic Policy Congress of First Nations Chiefs Secretariat (APC).
«Nous faisons également beaucoup de travail pour aider au développement communautaire. Je parle ici du chemin parcouru d’un point de vue du développement économique de la Première Nation Qalipu», affirme le chef Mi’kmaq. Il fait notamment référence au programme de santé de 12 millions de dollars pour les membres Qalipu dans le besoin, et au programme en éducation de 8 millions de dollars qui permet à environ 1000 jeunes Qalipu d’avoir accès à l’éducation postsecondaire et d’autres formes de formations.
Des festivités pour ce long chemin parcouru
Le chef Brendan Mitchell jette un nouveau coup d’œil par la fenêtre de son bureau. Une équipe est occupée à installer un barbecue qui commencera bientôt, et des stands avec des objets d’artisanat ont été installés. «Notre barbecue est gratuit pour tout le monde aujourd’hui!», précise-t-il. Des groupes de joueurs de tambours et des chanteurs – les Spirit Bay Drummers à Corner Brook – seront également présents dans plusieurs circonscriptions.
«Nous avons fait beaucoup au cours des dernières années pour être reconnus dans tout le pays, de Vancouver à St. John’s. Nous avons dix ans, nous sommes une Première Nation très jeune, mais nous avons parcouru un long chemin. Je suis impatient de voir ce que les dix prochaines années nous réservent», résume le chef, avant de nous laisser pour aller participer aux célébrations.
Fière d’être Mi’kmaq
«Quand j’étais jeune, j’ai toujours eu un intérêt pour la pêche, la chasse, le jardinage, ce type de choses faisaient partie de mon quotidien. Je n’ai pas toujours eu l’occasion de pouvoir les développer, car c’était avant la création de la Première Nation Qalipu et les programmes autochtones n’existaient pas ici», raconte Wendy Brake.
Originaire de Kippens, communauté proche de Stephenville, elle a appris très jeune qu’elle était Mik’maq. Trois de ses grands-parents, qui étaient au- tochtones, parlaient également le français. «Mais mes parents ne le com- prennent pas ni ne le parlent pas», précise-t-elle…en français.
C’est donc seulement à 17 ans que Wendy Brake a pu vivre sa première cérémo- nie de purification et son premier cercle de partage lors d’un programme militaire pour les autochtones au Québec en 2003.«Cette expérience m’a ouvert les yeux au sujet de la situation des autoch- tones au Canada», se souvient-elle.
Wendy Brake se réjouit que la bande Qalipu célèbre ses dix ans cette année. Elle est d’ailleurs membre depuis sa création officielle en 2011. «Moi je le vois comme une réussite, il a fallu beaucoup de personnes et d’efforts pour établir la bande! […] Je suis fière de faire partie des Qalipu, même si le processus [de reconnaissance] n’a pas été facile, je ne doute pas que cela va continuer dans une bonne direction à l’avenir.»
Justement, l’avenir. Wendy évoque ces deux filles, qui sont immergées dans la culture mi’kmaq au quotidien dans sa famille. «La culture, la langue… Je sais qu’elles vont avoir l’occasion de découvrir tout ça», conclut-elle.
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