le Lundi 1 Décembre 2025
le Jeudi 18 septembre 2025 16:37 Arts et culture

Dans l’air et dans le LSPU Hall avec la Compagnie Zalataï

  Thierry Caignic (Courtoisie)
Thierry Caignic (Courtoisie)

Que se passe-t-il lorsque vous croisez un jongleur détenteur d'un record mondial Guinness et une artiste d'aérobic pionnière de la technique multicord? Réponse: la Compagnie Zalataï, qui émerveillera et émouvra les spectateurs au Festival du cirque international Circusfest de St. John's.

Dans l’air et dans le LSPU Hall avec la Compagnie Zalataï
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Basée à Angers, dans l’ouest de la France, la Compagnie Zalataï réunit par l’art de cirque le couple Charlotte de la Bretèque et Alexander Koblikov. 

Habitué de St. John’s, où il avait déjà participé à une ancienne édition du festival avec l’Orchestre symphonique de Terre-Neuve, Alexander retrouve cette fois sur le vieux Rocher aux côtés de sa conjointe. Pour Charlotte, il s’agit toutefois d’une première expérience de scène au Canada.

«C’est quand même un grand jour», nous confie-t-elle. «C’est vrai que quand on regarde ce petit bout de terre, nous de France, on se dit, mais qu’est-ce que c’est cet endroit? Puis je me suis un peu renseignée, et voilà, moi, ça m’intrigue, j’ai envie de voir.» 

Si Alexander et d’autres anciens artistes qui ont déjà participé au festival lui ont raconté à quel point le paysage de l’île est «magique», les festivaliers découvriront au cours des prochains jours la magie propre de leur chimie artistique.

Deux disciplines, un seul spectacle

Lors de la soirée d’ouverture, le 18 septembre, de concert avec un spectacle commémoratif du 30e anniversaire de l’École de cirque du Québec, le duo transforme le LSPU en chapiteau. 

Présentant leur spectacle Bal(les), les deux artistes, chacun mondialement reconnu dans sa discipline, communiquent entre eux à travers des mouvements poétiques. L’un, par le jonglage, l’autre, par les cordes. 

D’où vient cette idée et comment est-ce qu’on crée du lien entre ces deux arts? «C’est vrai que c’était un peu la première question qu’on s’est posée aussi nous», dit Charlotte. «Parce qu’en fait, moi, je suis dans les airs et lui, il est au sol. Pas du tout les mêmes techniques, ça ne demande pas du tout la même chose. C’est-à-dire qu’Alexander, quand il jongle, en général, il ne peut pas vraiment me regarder. Par contre, moi, en faisant ce que je fais, je peux le regarder ou regarder ailleurs. Ce ne sont pas les mêmes contraintes. En fait, je pense qu’on a créé un duo où, moi je fais des équilibres sur les mains et lui, il jongle en quelque sorte avec des balles sur moi qui sont en équilibre. Et ça, ça a été le point de départ de tout ce qui s’est passé après.»

Aucun mot n’est prononcé, mais le public comprend les messages qui sont communiqués à travers le flux, le toucher, le poids et l’espace. «L’énergie qu’on a chacun dans nos disciplines et la façon de bouger nous lit», explique-t-elle. «Alexander a un côté dansé dans son jonglage, c’est très doux et ça ressemble un peu à l’énergie dans les cordes, donc ça fonctionne, ça fait du lien sans qu’on l’ait conscientisé. C’est des qualités de mouvements qui nous rassemblent finalement.»

«C’est marrant parce que c’est quand même toujours un peu pareil, les gens sont souvent très touchés en fait, ça les émeut», ajoute-t-elle. «En fait, les enfants voient plutôt le côté wow du spectacle, ça les impressionne et ils disent « vous êtes trop forts » et les adultes, je crois qu’ils voient le côté amour et ça les touche.»

Le spectacle leur a mérité en août dernier le Coup de cœur du public dans le festival Fest’arts à Libourne, près de Bordeaux. «On est trop heureux parce que c’est la meilleure récompense qu’on peut avoir», dit Charlotte. «C’est pour eux qu’on fait ça [car] c’est vraiment n’importe qui qui a vu le spectacle, qui a pu donner son avis, et je trouve ça super qu’on ait obtenu ce prix-là.»

En plus de son spectacle jeudi soir, la Compagnie Zalataï se produira le 21 septembre dans le cadre du cabaret multidisciplinaire Edge of the World, qui aura lieu au LSPU Hall à 20h.

Mondialement reconnus

Ayant tous les deux fait des tournées à travers l’Europe, en tant que duo et en tant que membre d’autres compagnies, cabarets et cirques.

En 2009, Alexander a reçu la médaille d’or du Festival Mondial du Cirque de Demain à Paris. Quatre ans plus tard, il remporte le Clown d’argent au Festival international du cirque de Monte-Carlo, au cours duquel il fait son entrée dans le Livre Guinness des records en jonglant avec 14 balles.

«J’étais jeune et dynamique. Maintenant on est vieux et mou», raconte l’artiste en riant. 

«Tu n’avais même pas demandé en fait, c’est eux qui regardaient», précise sa conjointe en soulignant la rareté de l’exploit: «Je ne pense pas qu’il y ait d’autres personnes qui jouent aux 14 balles, c’est quand même un problème!»

Charlotte, quant à elle, est reconnue pour avoir créé la discipline multicorde. En utilisant un rideau de fines cordelettes, le technique mélange de sangles aériennes, mât chinois, équilibres sur les mains et acrobaties.

L’artiste explique que ses expériences ont débuté «sur le tissu» il y a presque 20 ans à l’École Supérieure des Arts du Cirque de Bruxelles, mais son idée a germé: «Si j’avais plein de cordes, ça multiplierait les appuis», raconte-t-elle.

L’inspiration est venue d’un souvenir d’enfance. «Chez ma grand-mère, dans le sud de la France, il y avait ces rideaux contre les mouches… Je me suis dit que c’est hyper beau et pourquoi pas avoir un rideau, pas en un point, mais plein de cordes étalées.» De là est né son premier agrès: une barre surmontée de cordes multiples, rappelant un rideau en mouvement.

Elle souligne que «c’est toujours délicat de dire que oui [j’ai créé la discipline,] parce qu’on ne sait jamais vraiment qui a pu le faire avant.»

Pour Bal(les), les spectacles de rue et les festivals, elle a aussi adapté la mise en scène: «On voulait que ça soit moins frontal… L’agrès droit marche très bien de face, mais pas de profil. Avec la forme circulaire, on peut jouer presque en 360.»

En 2021, le couple a fondé la Compagnie Zalataï. D’où vient son nom? 

Russophone de nationalité ukrainienne, Alexander explique que le nom de la compagnie vient de sa langue maternelle. En russe, zalatoï, veut dire «doré» et «rapiécé». 

«On aimait bien le contraste entre quelque chose de vraiment luxueux, joli, et puis en fait un autre truc où tu caches la misère», ajoute Charlotte.