Coline Tisserand
C’est sur la route pour St. John’s que le trentenaire a pris le temps de nous parler de sa musique. Cet arrêt dans la capitale – un premier passage dans la province pour Medhi et son musicien batteur qui l’accompagne – clôt sa tournée «Acadie Batata», qui les a menés en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick. Une tournée placée sous le signe du retour, puisque le chanteur a notamment vécu à Moncton et à Dieppe. «Avec ce dernier concert, iI y a une sensation d’apothéose […], mais là, on termine dans l’inconnu ensemble! Ça ressemble au dénouement de la vie comme telle…», commente-t-il.
«T’sé», «you know», «du coup»: il suffit d’écouter parler ou chanter Medhi Cayenne quelques minutes pour comprendre «l’impression d’avoir les fesses entre deux chaises» ou cette «sorte d’identité diasporique» qu’il évoque brièvement pendant l’entrevue. Né d’un père algérien, et d’une mère française, il a vécu, entre autres, à Montréal, Gatineau, et Ottawa.
Une œuvre musicale éclectique
Cette pluralité d’horizons se ressent d’ailleurs dans l’écriture de ses textes et dans la texture musicale de ses chansons. Des sonorités hip-hop, folk, pop, en passant par la texture sonore du rock alternatif, le son abrasif du punk, ou encore des textes qui rappellent parfois le slam, sa musique est éclectique et «inclassable dans la francophonie internationale», peut-on lire sur son site internet.
Avec son dernier album Radio Batata, sorti il y a deux ans, l’artiste a souhaité explorer des sons différents, avec une influence plus électronique pour «s’éloigner un peu d’un son de groupe comme tel, avec une facture sonore qui tire sur différentes palettes autres que la guitare, la batterie et la basse». Sur scène, aux chansons de ce quatrième album qui continuent d’évoluer, s’ajoutent de nouvelles œuvres inédites, dans lesquelles le francophone explore encore davantage diverses couleurs sonores. «On dirait que chaque album précédent annonce en quelque sorte les couleurs de l’album qui suit. L’un est toujours un peu le prélude de l’autre. […] Radio Batata annonce bien ce qui s’en vient», observe-t-il.
Des chansons comme des animaux sauvages
Medhi Cayenne se soucie moins de ranger sa musique dans une «boîte» précise, que de privilégier l’énergie particulière qui se déploie une fois sur scène. «Il y a un truc qui se passe au niveau de l’énergie sur scène, je pense que c’est surtout pour ça que les gens vont [à mes concerts] et viennent revoir. Dans le fond, c’est pour mon jeu de jambes!» plaisante-t-il.
Des traits d’humour aux métaphores imagées, on devine rapidement que l’artiste est un amoureux des mots et de la poésie. «J’éprouve le besoin d’écrire des chansons parce que cela me permet de mettre en mots de choses qui me sont indicibles dans le quotidien. J’ai l’impression que les trucs qui vont m’attirer en matière de texte reflètent deux pôles, l’aspect transformatif de la poésie et ce qui appartient à l’indicible […], explique le musicien, qui est aussi chroniqueur à la radio et comédien.
Son processus créatif, il l’évoque l’évoquer de manière presque mystique. «On ne sait jamais de quel endroit va venir une chanson. Est-ce qu’elle va sortir de l’étang? De la radio? Est-ce qu’elle va sortir du corps? Tu ne sais pas vraiment de quel côté cela va venir. Tu l’attrapes un peu au fur et à mesure, et une fois que tu apprivoises quelques-uns de ces animaux sauvages, ça crée une espèce de bergerie qui s’avance et qui va venir sur l’arche des douze chansons.» Une arche musicale sur laquelle on embarque bien volontiers avec lui.
Les commentaires sont modérés par l’équipe du Gaboteur et approuvés seulement s’ils respectent les règles en vigueur. Veuillez nous allouer du temps pour vérifier la validité de votre premier commentaire.