Depuis une soixantaine d’années, Labrador City (au premier plan) et Wabush (à l’arrière-plan) accueillent les travailleurs des mines de l’ouest du Labrador et leurs familles. Les bâtiments provisoires et baraquements des premiers temps ont laissé place à des quartiers résidentiels et des infrastructures pérennes. En 2021, dans ce vaste territoire isolé surnommé le «Big Land», entreprises et individus se heurtent à nouveau à une crise du logement, cette fois particulièrement forte et lourde de conséquences.Héritage d’un autre de ces moments de surchauffe de l’activité minière, dans les années 1970, le «parc aux caravanes», à l’ouest de Labrador City, est constitué de maisons mobiles apportées par chemin de fer, lui conférant un aspect unique. À l’origine, ce lotissement avait été pensé comme une solution d’aménagement temporaire. Depuis, la plupart des maisons mobiles ont été entretenues, voire agrandies avec un sous-sol. Quelques-unes cependant sont restées dans un état plus vétuste.En période de boom de l’activité minière – comme c’est actuellement le cas – le besoin de logements pour les personnes travaillant dans les mines (certains étant des navetteurs, les fly-in/fly-out, et d’autres résidant plus ou moins durablement sur place) crée une tension forte sur le marché de l’habitation. Les compagnies minières y répondent en particulier par l’achat de biens immobiliers, notamment des hôtels, la construction d’immeubles réservés à leurs travailleurs, la location de chambres d’hôtel de la région réservées plusieurs mois à l’avance, ou comme ici sur la photo («IOC» fait référence à la compagnie Iron Ore du Canada) l’installation de camps dans des préfabriqués aménagés.La maison individuelle détachée, accompagnée de son terrain en avant et en arrière, forme encore la majorité du bâti résidentiel dans l’ouest du Labrador. Les maisons jumelées et en rangées sont également nombreuses. Relativement peu de maisons sont disponibles en location, et lorsqu’elles le sont, en période de crise de logement comme aujourd’hui, le loyer en est particulièrement dispendieux – hors de portée pour une partie de la population qui n’a pas accès aux emplois les plus rémunérateurs dans les mines. En période de boom minier, la forte tension sur le parc immobilier fait en sorte que ces maisons se vendent à plus haut prix.Les appartements sont peu nombreux à Labrador City, encore moins à Wabush, ce qui ag- grave la situation d’un parc locatif très restreint par rapport aux besoins réels de la population. Trouver des investisseurs susceptibles de prendre le risque d’activités (et donc de revenus) cycliques, en lien avec l’activité minière, reste complexe. Il est ainsi très difficile de développer le parc immobilier. Les partenariats publics-privés ou des projets immobiliers de type coopérative en sont encore aujourd’hui à l’état embryonnaire. Malgré un besoin criant, il n’y a aucune résidence pour personnes âgées dans la région, en partie à cause de ces obstacles.La crise actuelle n’est pas la première du genre, et ne sera pas la dernière, suivant en cela les sinusoïdes de l’activité minière. Aujourd’hui, des familles et des individus ne trouvent pas à se loger comme ils le souhaiteraient dans l’ouest du Labrador, et certains quittent la région, faute d’accès à une habitation accessible. Cette situation ne fait qu’accroître la difficulté des embauches dans les secteurs autres que la mine: où loger les personnes que l’on arriverait à recruter? Un enjeu pour les responsables politiques, économiques et sociaux de la région – un enjeu identifié depuis de longues années maintenant.