À côté des coureurs de cadeaux qui se bousculent, ces jours-ci, sur la ligne de départ du marathon de l’avent, Élizabeth-Anne Malichewski est une tortue. La différence entre les deux : eux dépensent de l’argent, elle, du temps.
Sa demeure est un amalgame d’oeuvres d’art terre-neuviennes et chinoises – vestiges d’une vie antérieure d’expatriée dans l’empire du Milieu –, de photographies, de poteries, de vaisselle et d’autres bibelots. Sans conteste, Élizabeth-Anne apprécie les belles choses et elle en possède une bonne collection. Lorsque vient le temps de gâter ceux qu’elle aime, elle en offre d’aussi belles, gracieuseté de ses doigts de fée.
Sur la grande table de sa salle à manger sont exposées quelques créations originales qui se retrouveront sous le sapin cette année. Des cartes et des ornements en origami, des boîtes-cadeaux créées à partir de calendriers pliés, des oursins transformés en aimants pour le frigo et des poupées faites de vieux tissus. « J’ai eu une phase où je créais des poupées. J’avais des nappes brodées par ma grand-mère, mais elles étaient toutes trouées. J’ai trouvé une façon de remettre ses broderies en valeur. »
De sa grand-mère, elle n’a pas hérité que de nappes. Car ses présents maison passent pour des oeuvres piquées à la galerie du quartier. Sans nier sa fibre artisanale, la Terre-Neuvienne d’adoption s’empresse de se rendre : elle puise une grande partie de son savoir-faire sur YouTube, qui recèle de tutoriels. Elle a aussi recours à un ouvrage sur la confection d’origamis. « Lorsque ma fille était enfant, elle faisait des dessins que l’on photocopiait et qu’on transformait en cartes de Noël. À son départ de la maison, je me suis lancée dans l’origami », dit-elle. En plus de ses créations en papier recyclé, cette autodidacte aime aussi offrir des « cadeaux utiles », comme des gourmandises maison : confitures et marmelades de baies, biscuits.
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Le lièvre et la tortue
Entre les cours qu’elle donne au Refugee and Immigrant Advisory Council et son implication dans l’association de son quartier, Élizabeth-Anne ne chôme pas. Elle le concède : la confection de présents exige d’investir du temps. « Pour arriver à Noël, il faut quasiment commencer en janvier! » Elle produit donc ses cadeaux tout au long de l’année, « doucement, tout doucement », dit-elle, citant au passage Le Petit Prince : « c’est le temps que tu as perdu pour ta rose qui rend ta rose importante ».
Tout cela est bien constratant avec le marathon qui s’amorce au centre d’achats. Contrastant sur le portefeuille aussi! En effet, confectionner soi-même ce que distribuera le père Noël constitue une technique pour étirer le dollar, surtout lorsqu’on recycle le matériel qui nous tombe sous la main, comme le fait Élizabeth-Anne, par exemple avec des cartes de villes glanées en voyage. Dans son cas, tient-elle à préciser, le plaisir de la confection passe avant les économies réalisées.
Cette lutine native du Québec n’est pas seule à se ranger dans la voie du fait main. Depuis une dizaine d’années, le mouvement DIY (do it yourself) gagne de nombreux adeptes, si bien que de plus en plus de marathoniens des magasins rangent leurs sacs de course et optent pour des séances de création à la maison. « Et s’ils ne créent pas tout de leur main, les gens semblent se tourner davantage vers les artisans locaux pour faire plaisir aux êtres chers », constate Élizabeth-Anne.
Car pourquoi offre-t-on des cadeaux au fond? En cette ère où tout va vite vite vite, recevoir un présent confectionné « doucement, tout doucement » paraît comme un cadeau tombé du ciel!
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Un texte de Marilynn Guay Racicot publié dans Le Gaboteur du 5 novembre 2018.
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