Ce n’est pas parce ce qu’on a des ancêtres mi’kmaq qu’on est Mi’kmaq. Notre correspondant David Jensen explique pourquoi il a renoncé au statut d’autochtone.
David Jensen, Ottawa
Cette reconnaissance d’identité mi’kmaq n’est pas l’histoire de tous. Être admissible au statut d’autochtone ne se traduit pas toujours par le désir de l’obtenir. C’est quelque chose que je dis sans craindre de me faire contredire, car cette situation est la mienne.
En 2012, lorsque le gouvernement fédéral recevait les premières applications au statut d’autochtone pour la bande Qalipu, ma famille et moi-même avons commencé à faire des recherches sur notre connexion à ce groupe. Comme ma mère vient de la côte ouest, nous avions toujours considéré que ce lien existait.
Nous avons réussi à démontrer la connexion entre William (Prosper) Compagnon, un Mi’kmaq né sur une réserve en Nouvelle-Écosse en 1824, et ma mère. Nous nous sommes donc mis à remplir tous les formulaires nécessaires et à compiler tous les certificats de naissance expliquant les relations familiales.
Je me sentais mal à l’aise
Pourtant, à l’approche de la date limite de dépôt de candidature, j’ai commencé à me sentir mal à l’aise. Toute ma vie, je m’étais considéré comme ayant des racines anglaises et danoises. Avec mes cheveux et mes yeux clairs, et surtout avec mon nom de famille scandinave, il était plus facile pour moi de voir cette partie de mon histoire.
Je me suis donc demandé pourquoi je cherchais à obtenir le statut d’autochtone. Même si ça faisait partie de mon patrimoine, je n’avais aucune connexion avec le mode de vie ou la culture mi’kmaq. Je ne m’identifiais pas comme un autochtone. Je ne chasse pas. Je suis peut-être le pire pêcheur qui ait jamais habité Terre-Neuve. Je respecte l’environnement, mais je suis certain que quand mes ancêtres mi’kmaq protégeaient la Terre qui les nourrissait, ils ne pensaient pas à ramasser leurs cannettes vides de Pepsi et à les amener au Green Depot. Pour moi, le lien culturel a été perdu.
Une question d’identité
J’ai donc décidé de ne pas postuler pour mon statut. Je ne partage pas l’histoire, les connaissances, les coutumes, et surtout l’identité des Mi’kmaq, donc comment pouvais-je me permettre d’obtenir cette carte et tout ce qui vient avec? Ce n’est pas que je veux cacher cette partie de mon histoire, c’est simplement que ce n’est pas qui je suis.
Pour certains, ce patrimoine prend une place centrale dans la vie. Le fait d’être autochtone est quelque chose de partagé dans la communauté. On n’a qu’à regarder la municipalité de Cap-St-Georges. Comme partout sur la péninsule de Port-au-Port, une grande portion des résidents sont Mi’kmaq, à tel point que les résidents ont fondé la Benwah First Nation (aussi épelée « Benoit »), qui compte parmi ses membres des individus ayant le statut d’autochtone sous le groupe des Qalipu, et d’autres qui se considèrent autochtones même s’ils n’ont pas le statut. En plus de leur patrimoine français, cette histoire partagée est centrale à la vie et à l’identité des membres de la communauté.
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Lien internet : www.benoitfirstnation.ca
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