Le 6 juillet, la «Nuit francophone» au bar The Ship a ouvert le début des festivités de la 47e édition du festival Folk de Terre-Neuve-et-Labrador. Une mise en bouche musicale, organisée en partenariat avec le Réseau culturel francophone de Terre-Neuve-et-Labrador, pour nous donner un avant-goût francophone au festival.
Coline Tisserand
Il aura suffi seulement de deux pièces musicales du duo Ti-Jardin en ouverture de ce lancement spécial francophone pour que les personnes présentes dans la salle se mettent à frapper des mains et des pieds.
Il faut dire que ça gigue et ça reel avec le guitariste Mark Cormier et le talentueux et jeune accordéoniste Ryan Perrier! Les deux membres de Ti-Jardin, venus de Cap Saint-Georges pour l’occasion, alternent leur spectacle entre morceaux instrumentaux rapides et chansons francophones traditionnelles.
La musique de nos ancêtres
Parmi ces dernières, on reconnaît le titre «Le 25 de juillet», une chanson traditionnelle terre-neuvienne qui relate le départ de marins partis de Terre-Neuve pour la France se retrouvant pris dans une tempête pendant leur traversée. Le duo Ti-Jardin enchaîne ensuite avec plusieurs morceaux tirés de son deuxième album La musique de nos ancêtres. Sortie en mai dernier, l’œuvre rend hommage aux anciens musiciens et musiciennes de la péninsule de Port-au-Port. «Beaucoup sont disparus aujourd’hui, mais leur musique, elle, vit toujours», souligne Mark Cormier.
Monsieur Cormier fait ensuite un clin d’œil aux membres de sa famille présents dans le bar en reprenant une chanson composée en classe de français par sa fille, Marcella Cormier, à l’époque où elle était en 11e année. On aperçoit celle-ci en train de fredonner la chanson en même temps que son père sur scène.
Si Mark Cormier se charge de la voix pour les chansons, on peut observer Ryan Perrier giguer avec ses pieds sur une planche en bois, tout en jouant de son accordéon à boutons à une vitesse impressionnante. Et le tout, les yeux fermés! Des prouesses musicales soulignées par Monsieur Cormier. «Ryan joue de l’accordéon depuis 7 ans, il a vraiment un niveau incroyable pour ces années de pratique!». Avec tous ces morceaux entraînants, Ti-Jardin finit par réchauffer l’atmosphère du Ship et quitte avec une gigue rapide les spectateurs, prêts à accueillir la deuxième interprète de la soirée, Louise Gauthier.
Ambiance intimiste
«On va changer de vibes maintenant et se plonger dans une ambiance chanson française!» prévient d’emblée l’auteure-compositrice-interprète francophone à son arrivée sur scène, avant de dédier sa prestation à sa famille.
C’est justement à travers des chansons ayant pour thème la famille – la relation mère-fille avec «Ma petite fleur» ou encore la mort de son père avec le titre «Il s’en va» – que Louise Gauthier nous plonge progressivement dans une ambiance enveloppante et plus intimiste. Tous ces titres sont tirés de son premier album sorti récemment, Petit cœur, intitulé comme la chanson qui lui a valu le prix des Arts et Lettres de Terre-Neuve-et-Labrador en 2018.
L’artiste multidisciplinaire, qui vit depuis 14 ans à Corner Brook, reprend aussi deux chansons francophones, notamment «Au bord du lac Bijou» de Zachary Richard en hommage à sa mère, une grande admiratrice du Louisianais. À la demande d’une spectatrice, elle nous emmène également en France avec quelques couplets chantés à cappella de «Je l’aime à mourir» de Francis Cabrel, avec le soutien du public.
Le groupe formé pour l’occasion, le guitariste Gary Gallant venu de l’Île-du-Prince-Édouard, le contrebassiste Bill Simms et la choriste Agnès Mamet, également coordonnatrice du Réseau Culturel de Terre-Neuve-et-Labrador, contribue à créer une bulle calme et poétique dans la salle. Gary Gallant offre même au public une chanson de son cru au sujet de son grand-père avant de reprendre sa guitare pour accompagner le dernier titre de Louise Gauthier. «Oublie le passé, oublie les fautes, prends donc une chance et saute, saute, saute!», conclut-elle dans une gigue entraînante.
Une fin de soirée folk et rock
La soirée se clôture par une prestation de Colleen Power, une artiste bien connue de la province qui chante autant en français qu’en anglais. Accompagnée pour l’occasion de son groupe – guitare, basse et batterie –, l’auteure-compositrice-interprète bilingue fait voyager le public dans sa vie quotidienne terre-neuvienne à travers ses titres tirés de ses deux albums en français, Terre-Neuvienne (2006) et Le Bonheur Domestique (2013).
Elle enchaîne chacune de ses histoires, que ce soit une chanson sur un rat vivant dans son jardin, sur sa fille Claire, sur un habitué d’un bar saint-pierrais ou sur la vie d’un homard sous l’eau, avec une énergie rock et folk et toujours avec humour. Entre deux chansons, la Terre-Neuvienne originaire de la Baie de Plaisance en profite pour nous parler de son amour pour la langue française qui remonte à son enfance.
Après presque trois heures de musique en français, c’est sur les paroles de son titre classique Terre-Neuvienne que se termine la nuit francophone. Colleen Power, accompagnée par certaines personnes du public, chante: «Où je suis née, il y a une fierté et un esprit d’indépendance. […] Je suis une Terre-Neuvienne, je reste là toute ma vie». De belles paroles pour finir la soirée, et pour commencer le festival Folk de Terre-Neuve-et-Labrador le jour suivant.
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