Hannah Snider
Je n’avais même pas deux semaines lorsque mes parents m’ont amenée de Winnipeg vers Sidney, en Colombie-Britannique. À l’âge de cinq ans, on a traversé le pays en sens inverse pour s’installer à Dartmouth, en Nouvelle-Écosse. Je me suis fait des amis, j’ai commencé un programme de danse. Après deux ans, un autre déménagement – de nouveau à Winnipeg. Quatre ans plus tard, je me suis retrouvé à la 5e Escadre de Goose Bay, au Labrador.
Quel changement! J’ai passé d’une métropole à la petite ville de Happy Valley-Goose Bay. Je suis arrivée à la fin du mois d’août et j’ai été accueillie non pas par les gens chaleureux de la communauté, mais par un grand rassemblement de moustiques! De jour, j’étais entourée par les montagnes et des sapins à perte de vue, et la nuit par les aurores boréales dans un ciel étoilé. Des images à couper le souffle auxquelles je n’aurais pas eu accès dans une grande ville où la pollution lumineuse est reine.
Chez moi, la 5e Escadre
J’ai voyagé à travers le Canada plus d’une fois, mais ma famille n’avait jamais vécu sur une base militaire avant d’arriver à la 5e Escadre. La vie sur la base est différente en général, mais à la 5e Escadre c’est encore plus unique. La moitié de la base constitue la partie aérienne, proprement militaire, qui comprend les bâtiments, les hangars et l’aéroport. L’autre moitié est dédiée à la vie quotidienne des habitants: les maisons, l’épicerie, le gymnase et même un hôpital.
Imaginez-vous des rangées de maisons duplexe, toutes identiques l’une à l’autre. À la base, on appelle ces maisons des PMQ (Private Married Quarters, ou des logements militaires). Les PMQ sont des maisons standardisées avec tout ce dont une famille a besoin pour vivre une vie «normale», mais assez proche de l’aéroport pour entendre le bruit des fréquentes montées et descentes des avions et des hélicoptères. Une ambiance tranquille, quoi…
Et comme la base accueille encore des forces aériennes étrangères pour qu’ils puissent s’entraîner au-dessus des plaines rurales du Labrador, j’ai vu passer des avions de toutes sortes.
Une fois, alors que je me promenais sur la base, j’ai aperçu un énorme avion stationné sur la piste. C’était le plus grand avion que j’ai jamais vu de ma vie. J’ai appris plus tard que c’était un avion de transport allemand venu pour un des entraînements bisannuels des troupes. Cette semaine-là, j’ai croisé plusieurs fois les soldats allemands en uniforme, qui marchaient vers leur logement près de chez nous en rentrant du travail. C’était intéressant de les entendre bavarder en allemand.
La base abrite aussi l’escadron 444 de Soutien au Combat qui fournit une réponse rapide aux urgences locales.
Des rencontres brèves, mais qui laissent leur marque
La 5e Escadre de Goose Bay permet de tisser un fort réseau social, ce qui est très utile en temps de pandémie. Lorsque je suis arrivée à Goose Bay, je n’étais pas la seule qui venait d’emménager. Tous les résidents de la base étaient en quelque sorte nouveaux puisque les affectations d’un membre militaire et de sa famille durent habituellement 3 ans.
Ce qui est bien quand on est entouré d’enfants de militaires c’est qu’entre nous on se comprend. On connaît bien les hauts et les bas de la vie militaire et eux comme moi ont l’habitude de déménager. On a aussi l’habitude de développer de nouvelles amitiés et de le faire rapidement. Vivre sur la base m’a permis de me faire beaucoup d’amis et ce qui est encore mieux c’est que je risque de les recroiser ailleurs au Canada.
J’étais capable de m’exprimer et de mieux connecter avec eux ce qui m’a permis de m’intégrer rapidement sur la base et d’être moins triste. Quand j’ai trouvé le courage de m’ouvrir aux gens d’Happy Valley-Goose Bay, j’ai rencontré des gens chaleureux et épatants. J’ai vécu des expériences mémorables par exemple au centre de ski de fond Birchbrook. L’hiver, chaque samedi, moi et ma famille allions faire du ski de fond toute la journée. Nous parcourions les pistes sinueuses à travers les montagnes puis nous rentrions nous réchauffer au chalet. J’ai eu la chance d’en rencontrer des gens extraordinaires, fiers de leur communauté et de tout ce qu’elle a à offrir.
Malgré tous les défis, je suis contente et fière d’être issue d’une famille militaire. J’admire énormément ceux qui choisissent de servir notre pays, comme mon père, et j’en suis très reconnaissante. Souvent lors du Jour du Souvenir, on se concentre sur les soldats qui sont allés à la guerre, mais il ne faut pas oublier les familles militaires qui sacrifient beaucoup pour encourager la personne en service. Les familles qui sacrifient des maisons pleines de souvenirs, des amis et même leurs racines géographiques pour appuyer le membre en services. Cette année, le coquelicot sera bien sûr le symbole nous permettant de se rappeler des sacrifices d’autrefois. Il est aussi l’occasion de souligner les sacrifices quotidiens des milliers de militaires d’aujourd’hui et de leur famille, dont la mienne.
Cet article fait partie de notre dossier: Des souvenirs d’hier et des réflexions d’aujourd’hui
Le 11 novembre, les Terre-Neuviens et les Labradoriens prennent un moment pour se souvenir des horreurs de la guerre, des vies qui ont été prises et de leurs histoires. Pour commémorer le jour du Souvenir, Le Gaboteur a fouillé dans le passé pour trouver ces histoires qui méritent d’être rappelées et présente de nouvelles histoires d’aujourd’hui. Des archives et des spécialistes nous parlent des guerres passées, et un témoin nous rappelle des familles militaires d’aujourd’hui. (CB)
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